L’objectivité spirituelle

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L’objectivité spirituelle

Il est parfois question de se montrer « objectif » et donc, de voir notre conscience de nouveau reliée avec un objet des sens. Or, on précise bien, en psy éso, que la conscience relative aux objets est limitative et même, qu’elle implique les processus mentaux, autrement dit, les pensées.

Qu’en est-il dans ce cas ? Le problème n’est pas tant la pensée en elle-même que le fait qu’elle soit à chaque fois reliée au passé ! En effet, la conscience relative aux objets des sens nous ramène aux pensées et ces dernières nous ramènent aux Mémoires.
Il est peu envisageable que nous puissions avoir une pensée en réaction avec la perception d’un objet des sens, sans nous référer aux Mémoires.

Mieux encore : même si ce que nous observons, par exemple, ne correspond à rien de ce que nous avons préalablement mémorisé, le mental analytique tentera de faire correspondre au plus près, l’objet et l’un quelconque de nos souvenirs. Le mental est tout à fait incapable de « voir » le futur, n’est-ce pas ? Il ne peut que concevoir que ce qu’il a déjà connu. Et chaque fois qu’il connaît quelque chose considéré par nous comme « nouveau », en réalité, il classe immédiatement la chose dans le dossier contenant déjà des informations identiques, similaires ou complémentaires.

Le mental ne part jamais de zéro, même si on le croit : il rassemble ce qui, pour lui, se ressemble ou, plus exactement, « devrait se ressembler. » Cela au risque, bien évidemment, d’associer ce qui ne devrait surtout pas l’être. Il est donc question, ici, de nous montrer vraiment objectifs, afin de déjouer les pièges tendus par le fonctionnement de notre intellect, à savoir la manière dont les informations contenues dans notre mental se rappellent à nous quand les évènements paraissent les invoquer.

 

C’est là que réside la difficulté engendrée par la manière de concevoir le sens premier ou second des mots. Être vraiment objectif est une qualité spirituelle indéniable, mais bien rare sont celles et ceux qui ont compris le sens premier de ces mots. Se montrer objectif nécessite de permettre à la conscience de rester polarisée sur quelque chose de précis, assez longtemps, au début, pour en recevoir des informations directes.

Un peu comme si les objets, faute d’avoir réellement une âme telle que nous la concevons, possédaient au moins certaines informations à leur propre sujet. N’oublions pas que la matière est énergie, certes, mais aussi informations. Ces informations font partie intégrante des constituants spirituels de la matière, à savoir de l’esprit. Esprit qui semble bien placé pour connaître les objets des sens, puisque c’est lui qui les constitue, leur offre une forme tous !

 

Ainsi, en partant de la prémisse que tout objet rayonne et que nous sommes capables de capter puis d’interpréter ce rayonnement, il nous est possible de connaître les objets des sens (ce qui nous entoure) en recevant directement les informations les concernant. Ces informations, de nature spirituelle, ne passent donc pas par nos Mémoires mais « émanent » bien des objets eux-mêmes. Nos sens permettent simplement de capter ce même rayonnement.

Si nous réussissons à perdre ce réflexe fâcheux d’associer le contenu de nos Mémoires à ce que nous percevons sans cesse, dans notre vie de tous les jours, nous commençons à voir la vie sous un tout autre angle que celui propre à la majorité des gens. D’ailleurs, nous avons chaque jour la preuve de l’existence de cette faculté spirituelle et encore plus à notre époque.

 

En effet, pourquoi des gens acceptent-ils tout ce qu’on leur impose ou même propose comme s’il s’agissait de la vérité unique, tandis que d’autres ne cautionnent pas et perçoivent même l’opposé de ce que les autres perçoivent ? La réponse est évidente : tandis que les premiers ne font qu’observer leurs Mémoires, c’est-à-dire ce qui devrait être, normalement et comme toujours, au lieu de ce qui est pour cette fois au moins, d’autres se contentent de voir l’actualité et non le contenu de leurs Mémoires concernant ce qui leur est montré. Ainsi, les premiers accepteront de se faire inoculer n’importe quel produit encore à l’étude sans se poser de questions, tandis que d’autres refuseront et poseront un tas de questions embarrassantes.

Les premiers se disent qu’il n’y a aucune raison pour que les choses soient différentes, d’une décennie à une autre, tandis que les seconds ont appris à contrôler chacune des propositions qui leur est faite, jour après jour, sans se soucier de ce qui devrait être ou de ce qu’ils devraient faire, selon les croyances en vogue. Il est clair que si un objet inanimé peut rayonner des informations à son sujet, les formes spirituelles humaines que nous sommes contiennent encore plus de riches informations à leur sujet !

 

Lorsque l’objet d’attention est humain, alors l’observation a tout intérêt à se montrer ponctuelle et relative à ce qui est rayonné sur le moment, plutôt que de se référer à tout ce qui a été appris et qui est retenu (mémorisé, donc) au sujet de ce qui est observé. Essayons de nous montrer encore plus précis et cela par le biais d’un exemple concret. Vous observez une personne en train de pleurer. Si vous n’y prêtez pas attention, une foule d’idées disparates vont jaillir à l’avant-scène de votre conscience.

Certains diront que notre intellect va tenter de nous « expliquer » pourquoi cette personne pleure. Après tout, ce brave intellect est persuadé que c’est là son seul et unique boulot ! Dès le départ, cette idée qui consiste à croire que nos Mémoires contiennent toutes les raisons et toutes les réponses, même aux mystères du comportement d’autrui, est au moins singulière, pour ne pas dire mieux. Cela implique que tout est déjà connu, que rien ne change ni ne varie sans cesse. Or, nous savons que c’est au moins le contraire qui est vrai. Même celui qui refuse d’évoluer sera obligé de le faire, qu’il le veuille ou non.

 

La vie et certains évènements plus ou moins marquants, se chargeront de le changer en profondeur, même s’il ne le réalise pas tout de suite. Mais reprenons notre exemple. Une personne est en train de pleurer, OK. Pourquoi ? Comment le savoir, c’est elle qui pleure et qui a Sûrement des raisons de le faire, pas nous ! Nous sommes tellement persuadés de ne pas être capables de capter les raisons profondes ou premières de ce chagrin, que nous nous référons automatiquement à nos Mémoires.

Alors nous cherchons, dans nos souvenirs, quelles sont les raisons connues et plus ou moins valables de nous mettre dans cet état.
Hélas, en nos Mémoires, il n’y a que ce qui nous concerne nous, pas ce qui concerne les autres. Donc, nous ne pourrons trouver, au mieux, que les raisons qui, selon nous, pourraient justifier des pleurs. Et il est fort probable que, faute de mieux, nous projetions sur autrui ce contenu formel de nos propres Mémoires. Nous ne connaissons rien d’autre, voyez-vous ? C’est du moins ce que nous croyons.

 

Toutefois, si la personne pleure et que, comprenant le processus autonome mental, nous refusons d’écouter les prétentions de nos Mémoires via notre intellect qui croit pouvoir tout expliquer, il va alors se produire un phénomène très peu connu qui pourrait se résumer ainsi : Lorsque nous cessons de penser aux causes concernant autrui, c’est autrui qui nous informe directement des causes le concernant.

Autrement dit, si nous faisons cesser la moulinette mentale et refusons de lui prêter la moindre attention, c’est l’esprit lui-même et directement, depuis l’autre personne, qui nous explique ou nous fait ressentir « en live » les raisons de son actuel chagrin.

…. Et c’est sur cette idée pleine de promesses futures que nous en resterons-là, à propos de ce sujet intéressant.

(Extrait d’une conférence.)

Serge Baccino